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Sa résolution à cet effet ne devait jamais faiblir : pas un jour, pas une nuit, pas une seule minute.
Et c’est en suivant ce chemin pas à pas, sans défaillance et sans regret, que Jean-Sébastien Pomeroy se forgea, à tout petits bouts de songes, une existence d’amant qui, si qui que ce soit d’autre que lui en avait su le premier mot, eut fait pleurer d’envie Casanova, et déchiré d’émoi mille émules d’Orphée.
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L’on pourrait croire que, ce faisant, notre héros des mondes nocturnes se coupait des richesses d’une fort hypothétique « véritable » vie et se condamnait à ne recevoir de sa maitresse fantasmée que les seules réponses qu’il avait espérées d’elle fût-ce sans en avoir eu conscience – qu’en somme il passa sa vie à « aimer en rond », n’aimant que lui-même à travers une image projetée. La chose est en effet fort possible. Vraisemblable même.
Il conviendrait cependant peut-être s’attarder ne serait qu’un bref instant à la réponse que Djihesse aurait selon toute probabilité réservé à un pareil argument : « Ah bon ? Parce que selon vous (ou toi) un multimilliardaire qui dicte les politiques économiques de vingt-cinq pays et d’un coup de stylo condamne au chômage et à la misère des dizaines de milliers de travailleurs remerciés parce qu’il tient à serrer un peu plus fort autour de lui la doudoune le préservant croit-il de l’insécurité héritée de sa tendre enfance… relève d’une réalité davantage digne de notre soumission ? Hum. Ou un clerc réputé infaillible, qui décrète dans une langue éteinte depuis des siècles à quels usages hommes et femmes doivent réserver leur corps, leur temps et leurs espoirs ? Bon – si tu le dis. »
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Quoi qu’il en soit des arguments pseudo-pragmatiques que l’on voudra bien opposer aux univers auxquels Jean-Sébastien Pomeroy choisit de consacrer son temps de vie, ils furent ce qu’ils furent et l’un de leurs traits les plus marquants fut en tout cas de ne pas mener tout droit, eux, au massacre en toute bonne conscience de centaines de milliers de ses semblables.
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Ils furent au surplus d’une continuelle richesse, souvent d’une fraicheur, d’une fertilité et parfois d’une force d’envoutement telles qu’il n’est sans doute pas exagéré d’affirmer que si un reproche peut à coup sûr être adressé à Jean-Sébastien Pomeroy au sujet de son entreprise de vie, c’est bien celui de ne pas s’être contenté de vivre une seule existence mais une multitude.
Rien qu’un survol détendu permettrait d’en énumérer deux bonnes centaines – uniquement dans les rangs des plus marquants.
Quant à s’être contenté d’avoir été « l’infini ressassement des mêmes prémisses »… autant dire qu’une telle affirmation est tout ce que l’on voudra sauf digne de mention.
Ce que Jean-Sébastien Pomeroy découvrit d’inattendu au cours de ses nuits – et parfois de ses journées – de rêve suffirait non seulement à remplir au bas mot quinze encyclopédies (si l’on parvenait à leur trouver un nom puis à les classer) mais encore se trouva-t-il plusieurs fois transformé en profondeur par de subites rencontres… alors que là-dehors, le monde des jours, lui, poursuivait son train-train, interminable litanie de manifs hurlant l’insatisfaction, de bains de sang et de promesses creuses.
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