Un matin… (8/X)

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… et ce qu’il y découvrit tout à la fois le ravit immédiatement et le captiva.

De ce côté-ci, au pied de la colline, plantés sur un sol d’où toute trace de végétation avait disparu, ne se trouvaient plus que deux hommes. Deux brumeuses silhouettes sans visage, encore une fois, mais dont là aussi tout à coup il comprit qu’il connaissait l’identité : ces deux hommes, c’était lui !

Dans cette portion-ci du rêve de la colline, il était donc présent deux fois, pensa-t-il. Sauf que, le temps de le penser, à peine le temps de se dire « Ah, tiens, c’est moi… en deux exemplaires », il entendait une voix forte affirmer d’un ton péremptoire « Pas deux, trois ! » et que son point de vue changeait.

« Il » était à présent en bas de la butte et contemplait toujours la même scène, mais à présent aperçue à travers les yeux du « lui » qui s’était tenu le plus à droite dans l’image qu’il avait découverte la seconde d’avant. Le personnage d’en bas tourna la tête vers la gauche… et aperçut un nouveau sosie de lui-même, debout sur le tertre et regardant dans sa direction.

Aussitôt, le point de vue de lui-sur-la-butte reprit le dessus. Jean-Sébastien avait compris : de là-haut – si l’on peut dire – il observait une scène mettant en présence deux version de lui-même.

Et que se passait-il, dans cette scène ?

Ceci :

Le Djihesse qui se trouvait à gauche devait être à une dizaine de mètres de l’autre et semblait lui parler – mais la bande son n’était pas audible. Une longue et très fine baguette à la main, il dessinait sur le sol désormais sablonneux et expliquait à toute allure une, puis deux puis quinze silhouettes agglutinées qui leur ressemblait comme autant de gouttes d’eau, et l’autre opinait du bonnet. Et puis tout à coup… c’était l’autre, le Djihesse de droite qui tenait la baguette à la main et enseignait tout en dessinant lui aussi à une vitesse folle sur le sol d’autres silhouettes encore, entre lesquelles il ajoutait des traits ou sur lesquelles il esquissait des signes cabalistiques.

« Mais oui, bien sûr ! », le Djihesse de droite entendit-il tout à coup s’écrier la version de lui-même plantée sur le monticule.

Ce qu’il contemplait là c’était très littéralement un rêve de « mise à plat ».

Et il éclata trois fois simultanément d’un grand rire joyeux.

C’étaient elles, le deux premières « sortes » de rêves !

« Les feux de broussailles » durant lesquels on se défait la nuit des encombrements de souvenirs, d’émotions, d’élucubrations en surnombre amassés au fil des jours. Et les « mises à plat » durant lesquelles on amorce une vague carte géographique des infinités de contrées intérieures qu’au fil des nuits l’on a découvertes dans les replis de soi, et des hautes murailles qui les ceignent, et des routes qui les relient.

« Toutes ces années ! », se disait-il en continuant de rire à âme-fleur, « toutes ces années ! » avant de se rendre enfin compte de ce que non, ses rêves n’avaient pas été que de chatoyants éclats de ses jours, apparaissant puis s’annihilant sans rime ni raison.

Profondément endormi dans son fauteuil, le cigarillo éteint depuis longtemps et abandonné au bord du cendrier, ce soir-là, dans son rêve, sur la vielle colline, Jean-Sébastien Pomeroy dansa bel et bien.

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